Fondateur du mouvement Corse Social démocrate, Simon Renucci, député maire d’Ajaccio et candidat à sa propre succession, explique, à Corse Net Infos, ce que les Corses peuvent raisonnablement attendre du nouveau locataire de l’Elysée. Il demande un diagnostic précis de la situation insulaire et estime que la priorité est la transmission de la terre corse par la prorogation des Arrêtés Miot.
- Que vous inspire la présidence de François Hollande que vous avez soutenu ?
- Cette présidence ouvre une ère nouvelle, historique, dans le pays et nous allons continuer à nous mobiliser pour promouvoir la fraternité et la solidarité, qui étaient au cœur de la campagne. Les mots, qui nous caractérisent à Corse Social Démocrate, sont : rénover, réconcilier les Français entre-eux, mais aussi les Corses pour dessiner un avenir serein à nos enfants. François Hollande a ajouté : rassembler. Nous disons également : construire ensemble une société nouvelle qui nous ressemble et nous rassemble. Pour cela, la confiance, le respect, la solidarité et, pour les obtenir, la détermination sont nécessaires autour de pôles essentiels que sont la justice, le redressement économique et la jeunesse. Ces pôles ont permis une mobilisation importante et une indéniable dynamique. François Hollande les a, d’ailleurs, placés au cœur de sa campagne.
- Comment mettre concrètement en œuvre ces pôles ?
- En période difficile où les gens s’appauvrissent, où grandit la misère, la justice est indispensable, elle est un facteur d’harmonie qui rassemble les gens et les fait se respecter. Le redressement économique passe par des mesures assez sévères qui nécessitent, à mon avis, un véritable audit par la Cour des Comptes de la situation actuelle de la France. Le but est la subordination de l’économie de marché aux aspirations humaines qui, malgré des limites dues à la crise et à l’ampleur du déficit, est la base de la social-démocratie. Il faut un engagement collectif des Corses au service d’une société à rebâtir, où les jeunes auront une place centrale, plus juste et plus solidaire, et surtout une espérance d’avoir un emploi à terme après une formation. Les jeunes diplômés sont désemparés parce qu’ils ne trouvent pas un emploi ; ceux, sortis du système scolaire, ont besoin d’une aide spécifique. Les jeunes ont besoin de reprendre confiance, que les adultes leur disent : je sais que tu es capable, j’ai confiance en toi, viens travailler.
- Encore faut-il qu’il y ait du travail !
- C’est la raison pour laquelle François Hollande privilégie l’éducation. Je n’adhère pas à la social-démocratie par hasard, mais parce qu’elle prône une juste répartition des profits, le respect, le dialogue, le fait que chacun puisse se sentir en harmonie dans le pays où il vit, avec les institutions, ses voisins et lui-même. D'où le mot réconcilier.
- Qu’est-ce que les Corses doivent attendre de François Hollande ?
- François Hollande va offrir à la Corse, comme à l’ensemble de la nation, des mesures précises qui vont favoriser le quotidien. Certaines ont déjà été prises, comme le blocage du prix de l’essence, pour augmenter le pouvoir d’achat et favoriser une forme de croissance. Il aura également le souci d’être à l’écoute des Corses et nous ferons en sorte qu’il ait une écoute importante. Peut-être aurions-nous aimé entendre plus ? Mais, en homme sage à qui on reprochait de promettre plein de choses, il n’a rien promis de particulier. Il va certainement regarder le travail fait par l’Assemblée de Corse et voir, dans quelle mesure, il pourra répondre à ses aspirations. La vraie question est : que peut-on réellement obtenir ? Qu’est-ce qui est nécessaire ? Qu’est-ce que les Corses veulent vraiment et que peut-on faire pour la Corse ? Il ne s’agit pas de dire : François Hollande ne fait rien pour nous, il ne nous écoute pas. François Hollande ne va pas prendre notre place.
- Que pensez-vous donc qu’il soit raisonnable de demander ?
- Un diagnostic précis de la situation de la Corse. Plutôt que de demander, il faut s’interroger : où en sommes-nous ? Qu’est-ce qui a marché ? Qu’est-ce qui ne marche pas ? Quelles sont les difficultés économiques ? Où sont les freins ? Par exemple, les transports, le prix du pétrole, la complexité administrative… Se mettre d’accord sur ce qui marche et ce qui ne marche pas, et, ensuite, chercher à amplifier les uns et compenser les autres. Quelle économie veut-on pour la Corse ? Qu’est-ce qu’on propose ? Pourquoi on le propose ? Je suis un praticien, on m’a toujours demandé de simplifier des situations complexes et de faire des propositions simples. Ce que je redoute toujours, c’est que, pour une solution, on en propose une autre.
- Et vous, si vous êtes réélu député, que demanderez-vous au nouveau gouvernement?
- Je demanderais que les Arrêtés Miot soient repoussés de 5 à 10 ans pour permettre à la Corse de traiter son problème fiscal. Je souhaite qu'ils soient prorogés indéfiniment. On n’aurait jamais du les supprimer car cela revient à spolier les Corses de leur patrimoine. Le plus important, avant même de parler de logement ou d’emploi, c’est la terre corse avec ce que cela comporte de préservation et de transmission. Nous sommes dans une ère qui se caractérise par une crise de la transmission non seulement du patrimoine, mais aussi des valeurs, des savoirs, de la fraternité et du respect. C’est en s’aidant que les gens sortent de la misère. Mais, ce n’est pas parce qu’on traite la misère qu’on traite les comportements.
- Estimez-vous qu'il y a une perte de ces valeurs dans notre île ?
- Non. La Corse est confrontée à ses propres problèmes de société. Néanmoins, des progrès ont été faits dans tous les domaines. Malgré dix années de violence, l’économie corse a tenu, ne serait-ce qu’au niveau du tourisme. Les jeunes Corses diplômés, encadrés ou pas, ont de grandes capacités et représentent un potentiel fantastique. L’investissement majeur pour bâtir l’avenir, c’est la jeunesse. Dans la mondialisation, la crise économique, la lutte des continents, la Corse peut largement faire des progrès en étant davantage aidée par l’Europe qui est notre mère nourricière. Toute modification importante de l’économie, qui ira dans le sens du partage, ira dans le bon sens. C’est là que l’action va être importante. Les gens sont inquiets pour leur avenir, ils défendent la proximité, la justice, donc l’exemplarité et la diversité. C'est la démocratie moderne décrite par Pierre Rosanvallon, le père des sociaux-démocrates.
- Votre mouvement apporte-t-il des réponses à ces problématiques ?
- Notre mouvement Corse Social Démocrate décline des réponses qui ne sont pas individuelles ou partisanes, mais collectives. Le seul moyen pour favoriser la transmission, c’est le partage parce que c’est avec le cœur qu’on transmet. Dans la subordination de l’économie aux valeurs humaines, c’est-à-dire aux besoins, il y a un vrai choix de répartition des richesses et le social au cœur des priorités. Dans le social, le premier trait que l’on barre, c’est la santé qui est en recul. La Haute Autorité pour l’avenir de l’assurance maladie a publié, il y a deux mois, les grandes lignes des prestations à réduire pour les maladies chroniques. Le tarif des mutuelles a augmenté de 15%. La santé et la défense du service public sont deux enjeux majeurs dans les régions péri-urbaines et rurales où les gens sont éloignés des partis traditionnels.
- Ce sont ces populations qui, dans votre circonscription, ont voté Marine Le Pen…
- Oui. Pour ces deux raisons essentielles. Il n’y a pas sur le plan rural de vraie défense du service public et de la santé. Le PS avait déposé, sur ces deux points majeurs, un projet de loi qui s’appelait le Bouclier rural. Les gens, plus qu’avant, ont besoin de ce sentiment de solidarité, de justice sociale, d’égalité des chances pour les jeunes, d’égalité d’accès aux soins et aux prestations. Pour retrouver le financement de la sécurité sociale par l’URSSAF, il faut de la croissance. On est au cœur de la problématique.
- Comment expliquez-vous que la jeunesse en Corse ait, également, voté massivement Le Pen ?
- C’est faux. La jeunesse corse sur Ajaccio a voté aussi Hollande. Les études montrent que l'électorat Front National se compose plutôt d’adultes entre 35 et 49 ans, en perte des repères, en situation de souffrance, face à un avenir où ils ne peuvent pas progresser, des parents qui craignent de ne pas pouvoir donner à leurs enfants ce qu’ils ont et se sentent coupables. Sur l’échiquier politique est apparue une force qui a su, non pas proposer, mais parler à ces gens qui attendent des discours différents et surtout un acte de foi dans l’avenir. On juge une société à la façon dont elle traite les plus démunis. La vraie question est : est-ce qu’aujourd’hui, il y a une vraie place pour l’autre ? La première difficulté du monde moderne, c’est qu’on traite tout en urgence. La deuxième, c’est le zapping avec l’image sans le son. La troisième, c’est les habitudes qui rassurent. Les gens finissent par renoncer dans une société qui ne laisse pas de place à l’autre. Or, il y a des moyens de ne pas renoncer. Le premier est d’être joyeux. Quelles sont les grandes sources de joie offertes aux citoyens de base ? Après, il faut être libre dans sa tête et dans ses choix. Enfin, il faut être fidèle à soi-même, à ceux qu’on aime, à ses convictions, à la société, à la Corse et aux idées que l’on défend. Les gens sont très attachés à la justice et à l’égalité, mais également à vivre en harmonie et en paix, sinon ils ont peur.
- La paix semble un vœu pieux en Corse avec toute cette violence liée à des dérives mafieuses et autres. Que faut-il faire, selon vous ?
- Je citerais Sénèque : quand l’argent est tout, l’homme n’est rien. Il faut apporter la paix surtout entre les gens qui sont blessés et meurtris, c’est là que, plus que jamais, il faut avoir le courage de l’espérance. Sans quoi, on ne s'en sortira pas. Le véritable enjeu de la Corse est démocratique, ce qui signifie l’exemplarité. Si vous voulez que les gens vous respectent, vous devez être bien élu et respecter les autres. Michel Serres dit que l’emblème de l’homme, c’est la pelle qui permet de retourner la terre. Mais retourner la terre pour la semer, pas pour enterrer des gens. Ici, nous avons tout pour réussir dans le monde moderne. Il suffit de nous entendre sur les objectifs essentiels et de continuer à partager comme nous partagions avant.
Propos recueillis par Nicole MARI
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ANDRE C (jeudi, 24 mai 2012 01:52)
IL FAUT ARRÊTER DE DIRE CA LES ARRÊTÉ MIOT NON JAMAIS RÉELLEMENT APPLIQUER EN CORSE
Mathieu (jeudi, 24 mai 2012 10:46)
Il se réveille à la fin de son mandat. Cet homme est incohérent ! Il est dans l'image et non dans l'action. À aucun moment, le poids que représente un député n'a été mis au profit de la corse sous son mandat , il s'est rangé derrière des positions partisanes durant tout son mandat.
Anne Catherine (vendredi, 25 mai 2012 11:40)
Bravo à lui ! Son bilan est excellent. Il s'est battu dans l'opposition, j'espère de tout mon coeur qu'il continuera à nous représenter dans la majorité !!! Nous avons besoin de lui ! Ajaccio a besoin de lui ! Forza Simon Renucci !!