Transports maritimes : L'aide sociale torpillée !

Paul-Marie Bartoli et Paul Giacobbi
Paul-Marie Bartoli et Paul Giacobbi

L'assemblée de Corse va débattre, ce jeudi, des deux épineux dossiers des transports maritimes et aériens. Côté maritime, le président de l'exécutif de la CTC, Paul Giacobbi, et le président de l'Office des transports (OTC), Paul Marie Bartoli, annoncent la refonte totale du système de la DSP, le retour aux fondamentaux avec un service de base sur Marseille, la suppression du service complémentaire pour l'été et de l'aide sociale aux passagers.

Le système de desserte maritime de la Corse a été coulé, corps et biens, par la décision de la Cour d'appel de Marseille et divers autres rapports et avis, dont celui de l'Autorité de la concurrence. Forcée de revoir sa copie au moment où la SNCM tangue en pleine tempête sociale et financière, la Collectivité territoriale (CTC) a donc décidé de remettre à plat un système qui, de l'avis général, prend l'eau de toutes parts.

Un service de base

En ces temps de disette budgétaire et de gel des dotations d'Etat, Paul Giacobbi et Paul-Marie Bartoli se sont recentrés sur les fondamentaux de la continuité territoriale pour réduire le périmètre de la future délégation de service public (DSP) à sa portion congrue.

A savoir une DSP limitée à un service de base uniquement sur le port de Marseille avec 7 cargos mixtes (4 SNCM et 3 CMN) pour transporter le fret et les passagers insulaires.

Ces cargos totaliseront une capacité de 410 000 passagers annuels, soit 34 000 passagers mensuels, et 1,6 million de mètres linéaires de fret par an. La fréquence atteindra 46 traversées hebdomadaires, 7 jours sur 7 pour Ajaccio et Bastia et 3 jours sur 7 pour les autres ports insulaires.

La fin du service complémentaire

Pas question, donc, d'étendre la DSP au port de Toulon, malgré une volonté initiale, c'est, selon l'OTC, illégal et pas rentable.

Mais surtout, cette configuration, qui se veut en stricte conformité avec le droit, torpille le service complémentaire pour l'été et la fameuse aide sociale au passager transporté au profit du seul tarif résident. "Nous ne voulons pas payer plus cher que ce dont nous avons besoin. Nous définissons un périmètre pour que la demande Corse/Continent soit satisfaite. On ne veut pas que les compagnies candidates prennent prétexte des volumes pour faire une offre extravagante. La Corse ne peut pas payer des surcouts qu'elle ne peut pas absorber", explique Paul Marie Bartoli.

Une SEM à l'étude

Sur l'aide sociale, la sentence est sans appel. "L'aide sociale est tout sauf une aide sociale. C'est une subvention forfaitaire par rapport au nombre de passagers qui ne correspond à rien car ce n'est pas une vraie OSP ", poursuit le président de l'OTC.

Dans la foulée, Paul Giacobbi a annoncé la mise en place d'une commission ad hoc qui aura pour tâche d'analyser les conditions et les conséquences économiques, financières et juridiques de la création d'une compagnie régionale. Le président de l'exécutif n'exclut pas, non plus la possibilité de création d'une société d'économie mixte (SEM) réunissant la CTC et d'éventuels partenaires privés.

Des salariés en rade

La feuille de route proposée par l'exécutif territorial se veut résolument centrée sur les besoins de la Corse, faisant fi de toute autre considération, y compris la menace sur les emplois. Que la réduction de la DSP cloue au port deux navires de la SNCM, le Napoléon Bonaparte et le Danielle Casanova, et met à pied 800 marins, ce n'est franchement pas l'affaire de la CTC, comme l'ont rappelé en choeur et fermement Paul Marie Bartoli et Paul Giacobbi. "On ne peut pas accuser la CTC de mettre deux bateaux à quai et de licencier 800 marins. On ne peut pas lui demander de maintenir le service complémentaire pour deux ferries. La SNCM peut exploiter ces deux ferries ailleurs, sur les ports de Nice et de Toulon, mais sans subvention. On n'en a pas le droit. Ce n'est pas légal. On n'a pas l'argent et ce n'est pas dans l'intérêt de la Corse".

La difficile équation communiste

Difficile d'imaginer que les marins de la SNCM acceptent cette mise à la trappe sans broncher. La CGT promettait un printemps houleux. Elle risque bien de tenir ses promesses.

Le débat prévu, ces deux jours, sur le dossier risque également d'être rude. On se demande comment les élus communistes, soutiens actifs et intangibles de la CGT marins et d'un service public fort, vont avaler la couleur de leurs alliés de la majorité territoriale et comment ils vont pouvoir voter un blanc seing au naufrage de leurs revendications.

Affaire à suivre.

                                                                                                                                N. M.

La SNCM à 1 € : Trop cher !

La proposition de Veolia de céder la SNCM à la CTC pour 1 fait bondir le président de l'exécutif. Paul Giacobbi dénonce "la gestion calamiteuse " de Veolia et estime que la CTC ne "doit pas régler l'ardoise de son incurie". Il s'attache à démontrer que la reprise de la SNCM serait "tout, sauf un cadeau".

Ce mercredi matin à l'assemblée de Corse, Paul Giacobbi était très remonté. Les discussions, les tensions, les rumeurs, les injonctions, les menaces, qui "enfument " le dossier de la desserte maritime Corse/Continent, ne sont vraiment pas de son gout. Et il a tenu à le faire savoir haut et clair. "Je suis peu sensible aux pressions et aux rodomontades".

Une bouffée délirante

Par dessus tout, ce qu'il ne digère pas, c'est l'ahurissante proposition fortement médiatisée de Gérard Couturier, le président du conseil de surveillance de la SNCM, de céder la compagnie à la Collectivité territoriale (CTC) pour 1 . "J'ai été surpris par cette bouffée délirante de proposer la SNCM à 1. C'est une manière de faire fantaisiste et révélatrice des difficultés du groupe Veolia qui est lourdement endetté et coutumier du fait. Il a clamé qu'il veut vendre son activité transport mais aucun pigeon ne s'est présenté. Cette manière de procéder est inconvenante et répréhensible ".

Et d'expliquer ironiquement que Veolia ne peut céder gracieusement et en totalité ce qu'elle ne possède pas. La société ne contrôle que 33 % du capital de la SNCM, et encore indirectement à travers Transdev Veolia.

1, c'est cher !

Le président de l'exécutif va, ensuite, remettre sèchement les pendules à l'heure aussi bien pour la compagnie que pour les syndicats et les élus qui semblent tentés par

l'aventure. " La SNCM à 1, c'est horriblement cher parce qu'elle vaut moins qu'1 ".

La démonstration sera brutale. Au moment de sa privatisation, la SNCM, recapitalisée par l'Etat, n'a plus de dettes, sa valeur est établie à, au moins, 190 millions d'euros. Paul Giacobbi estime donc que la proposition actuelle de 1  signifie que les dirigeants de la SNCM ont "en 4 ans, annihilé par une gestion calamiteuse 200 millions d'euros".

Une reprise couteuse

Selon lui, la facture de la reprise de la SNCM serait salée. Elle devrait, d'emblée, englober 50 millions  de trésorerie et une forte recapitalisation pour compenser les pertes. A cela s'ajoute le coût de la restructuration "d'autant plus gigantesque que Veolia se lave les mains de sa responsabilité d'employeur" et le remboursement probable des subventions liées au service complémentaire qui ont été jugées illégales. Subventions qui, cumulées sur 7 ans, atteindraient 200 millions . Une société, la Sernam, vient juste d'être condamnée par l'Europeà rembourser une aide indue de 650 millions .

Refusant de "régler l'ardoise de l'incurie", le président de l'exécutif rencontrera, dans les prochains jours, le président du groupe Veolia et le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations pour "relancer une situation qu'ils ont rendue dramatique".

N.M.


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