Antoine Sindali : « L’ancien système de DSP n’est plus possible »

La signature de la DSP aérienne et le houleux dossier maritime seront à l’ordre du jour de la prochaine session de l’assemblée de Corse (CTC), les 22 et 23 mars. Antoine Sindali réagit, pour Corse Net Infos, à la proposition de Veolia de céder la SNCM pour 1 €, qu’il qualifie de « poker menteur ». L’élu territorial UMP, ancien président de l'Office des transports (OTC), estime que le système actuel a vécu et prône un service de base avec des navires mixtes.

- Que pensez-vous de la situation des transports insulaires avec les deux volets aérien et maritime ?
- Il y a deux volets certes, mais ce ne sont pas des volets séparés. Tout se tient. Il faut les traiter simultanément pour une raison très simple : ces deux dossiers concernent un service public important que nous devons subventionner et il faut savoir où mettre le curseur entre l'aérien et le maritime. On ne peut pas subventionner un service public aérien extraordinaire nécessitant beaucoup de crédits, ces crédits manqueraient pour le maritime et inversement. Donc, il faut voir tout globalement.
- Les négociations dans l'aérien ont abouti. Qu'en pensez-vous ?
- Les deux dossiers ont été finalisés. Le dossier sur la ligne de Paris est plus lourd que celui du bord à bord car c'est un service dont les obligations ont été augmentées. Qui dit augmentation d'obligation dit subventions supplémentaires. C'est un dossier aussi où les coûts des escales, gérées par Air France pour les deux compagnies, sont importants.
- Air France ne les gèrera plus...
- Dans les négociations, comme dans les parties de cartes, il y a parfois un peu de poker menteur. Qui fait la surenchère la plus importante, en général, est la partie qui veut de l'argent. La sortie des négociations est difficile. Il y avait une demande d'augmentation des subventions, subventions que j’avais réduites lors de la dernière DSP.
- Sur le maritime, que pensez-vous de la proposition de Veolia de céder la SNCM pour 1 €  à la CTC ?
- Dans ces négociations qui sont encore plus tendues que dans l'aérien, il y a, là aussi, une sorte de poker menteur.
- Est-ce un coup de bluff ?
- C’est peut-être aussi un coup de bluff. On peut comprendre que Veolia soit excédée. Mais il ne faut pas qu'elle soit excédée par la nécessité de mettre en place un bon service public et par les attentes de la CTC. La CTC et la population dans son ensemble veulent un service maritime qui répond aux intérêts de la Corse. Les responsables de la SNCM, menés par la filiale de Veolia, devraient d'abord régler le problème de la CGT marins du port de Marseille avant de rendre responsable la Corse et de lui faire un cadeau empoisonné.
- Certains élus ou syndicats s’en réjouissent…
- Ils s’en réjouissent à la manière du poker menteur dans le sens de la surenchère sans voir les réalités. Refiler les bateaux pour 1€ symbolique alors qu'il y a des dizaines de millions d’euros de trésorerie à rembourser, il faut raison garder. Il faut aussi tenir compte du fait qu'il y a plusieurs compagnies. On ne peut pas les écarter parce qu’on est dans un état de droit et qu’il y a des réglementations européennes. Je ne crois pas que l'Union européenne soit prête à accepter un règlement particulier pour la Corse. Donc, il faut, en tenant compte de ce règlement et des possibilités d'actions, définir le meilleur pour la Corse.
- Que serait-il ?
- Le meilleur pour la Corse, c'est, d'abord, un bon service de base de desserte des ports insulaires sur Marseille avec des navires mixtes pour transporter les passagers et surtout le fret afin de diminuer le cout du fret et les tarifs résidents. A partir de ce service-là, vérifier, ensuite, l’utilité d'avoir encore un service complémentaire avec des centaines de milliers de places offertes, subventionnées, pour des taux de remplissage autour de 30% ou 40%. On ne peut pas jeter l'argent public par les fenêtres. Des négociations sont nécessaires parce qu'on déborde largement l'enveloppe de continuité territoriale. Faire des économies sur le maritime permet d'injecter une partie de la dotation de la continuité territoriale sur l'aérien. Tout se tient. C'est une affaire de discussion afin de trouver la bonne place pour le curseur et d’obtenir une organisation équilibrée.
 - C’est-à-dire ?
- On ne peut pas toujours servir 4 ports et 6 aéroports. La Corse n’est pas une île, c’est un archipel, elle est morcelée. On arrive de tous côtés alors qu’on devrait avoir 2 gros aéroports et 2 gros ports. Mais allez supprimer dans l’aérien Calvi et Figari, et allez supprimer dans le maritime Porto Vecchio, L'Ile-Rousse et Propriano ! Ce serait la révolution. Et on peut le comprendre. Donc, il faut tenir compte de la loi des petits nombres qui nous caractérise en Corse et trouver un équilibre entre les exigences réglementaires et financières, les problèmes sociaux qui en découlent et les intérêts et les attentes des usagers. Cet équilibre doit permettre de faire des économies.
 - Quel est votre sentiment, en tant qu'ancien président de l'OTC, sur la manière dont votre successeur gère actuellement ces dossiers des transports ?
- Il ne faut pas faire de surenchère. J'ai été aux responsabilités, je sais que c'est délicat. Je ne veux pas pratiquer la langue de bois.
- La CGT promet un printemps des transports houleux…
- Les syndicats sont légitimes dans leurs actions. Mais l’organisation du service public aérien et maritime, quelque soit la légitimité des demandes des salariés, n’est pas pour les salariés, c’est pour la population, pour le transport du fret et pour l’économie. Ce qui ne signifie pas qu’il ne faut pas prendre en compte les salariés, il faut trouver le juste équilibre. Ce n’est pas tout d’un côté. Continuer dans l’ancien système, de mon point de vue, ce n’est plus possible.
                                                                               Propos recueillis par Nicole MARI

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