"Laurent Marcangeli : « Un contrat de mandature entre la droite et les nationalistes »

 

Représentant le plus prometteur de la jeune génération de droite, Laurent Marcangeli entend défendre la charte des langues minoritaires, le transfert de la compétence fiscale à la CTC et se dit favorable à un mode d’autonomie de la Corse. Il prône, pour les prochaines élections territoriales, un contrat de mandature entre la droite et les nationalistes.

- Que pensez-vous de la position de Nicolas Sarkozy sur les langues minoritaires ?
- Lorsque le Président de la République, dont tout naturellement je soutiens la réélection, dit que jamais la France ne signera la charte des langues minoritaires, je ne suis pas d’accord avec lui. Si je suis élu au Parlement, je ferais en sorte de convaincre ma famille politique de me suivre dans cette démarche. Un parlementaire n’est pas pieds et poings liés à une logique d’appareil, de godillots et de parti. Il a beau être un élu national, il a un certain nombre de choses à faire passer. Et quand sa famille politique ne va pas dans le bon sens pour la circonscription et la Corse, il ne faut pas hésiter à le dire.
- Êtes-vous favorable au transfert de la compétence fiscale ?
- Oui. La CTC a besoin d’être dotée de moyens financiers correspondant aux compétences importantes qui sont les siennes. Il faudra à tout prix avoir une réflexion sur le sujet. Pourquoi pas une proposition de loi ? C’est le rôle d’un député. On ne peut pas laisser la CTC se débrouiller seule avec la Commission Chaubon, il faut que le parlementaire, qui écrit la loi, le fasse. Le député sortant n’a pas fait de proposition en ce sens. Il n’a d’ailleurs jamais fait la moindre proposition de loi. Pendant dix ans, il n’a fait que cosigner des propositions déposées par ses amis du PS. Il y a aussi un débat nécessaire, qui aura lieu pendant cette mandature, sur le mode d’autonomie. Il ne faut pas en avoir peur.
- Qu’entendez-vous par là ?
- Se doter des moyens financiers correspondant aux compétences que nous exerçons déjà est la première étape. Mais, immanquablement, la  2ème phase de la décentralisation ira pour nous, puisque nous en sommes déjà aux portes, vers l’autonomie. Le débat ne doit pas s’arc-bouter comme dans les années 90. Le fait d’appartenir à une génération tournée vers l’avenir et en phase avec son temps permet d’avoir une attitude beaucoup moins crispée que d’autres générations ont pu l’avoir. Le fait d’être élu au Parlement ne doit pas dispenser d’ouvrir un certain nombre de débats.
- Quel type d’autonomie ?
- Tout simplement d’organiser, comme cela se fait dans d’autres régions d’Europe, une délégation de compétences fortes en faveur d’une région qui est déjà dotée d’un statut particulier. La Corse est une île qui, comme ses sœurs de Méditerranée, la Sardaigne, la Sicile ou les Baléares, peut être amenée à  avoir un certain nombre de compétences qu’elle n’a pas aujourd’hui. Mais, au vu de ce qui s’est passé avec les deux lois de décentralisation de 1991 et 2002, il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs.
- La nouvelle génération d’élus paraît plus progressiste, plus ouverte et moins axée sur une logique d’opposition politique frontale. Qu’en pensez-vous ?
- Sur des élections locales, c’est-à-dires municipale, cantonale et territoriale, on ne peut effectivement pas rester sur des schémas figés qui, de toute manière, ne parlent pas aux habitants. Les querelles entre droite, gauche et nationalistes sont un peu datées. A l’avenir, il sera nécessaire de rassembler au maximum et surtout de se déterminer en fonction de ce qui est le plus important : une bonne et une mauvaise gestion. Pas une gestion de droite ou une gestion de gauche, qui ne signifie rien pour les habitants d’un territoire qui veulent des réponses aux problèmes de la circulation, du traitement des déchets, des infrastructures sportives, culturelles…
- Marcel Francisci a prôné une ouverture vers les nationalistes. Peut-on imaginer une coalition droite/nationalistes pour les territoriales ?
- En 2014, au moment du scrutin territorial, les deux forces d’opposition, droite et nationalistes, auront, toutes deux, un regard assez critique sur le bilan de la majorité. Le but des oppositions est de proposer une alternance. Il y aura, par conséquence, l’obligation, peut-être, de regrouper l’ensemble des forces d’opposition pour conduire les affaires de la Corse. A ce moment-là, chacun prendra ses responsabilités. Soit, on choisit de ne pas s’unir, soit on s’unit avec un contrat de mandature et on explique aux Corses pourquoi on estime nécessaire d’unir nos forces, nos capacités et nos compétences pour gérer les affaires publiques. Ce contrat de mandature existe dans des communes et peut exister, demain, à la CTC.
- Est-ce un chemin possible pour vous ?
- Ce n’est pas un chemin qui me fait peur. Je n’ai aucun à-priori sur un contrat, un accord librement consenti entre deux parties sur des bases fermes, solides, saines et transparentes.
- Même si les nationalistes ont des revendications très précises, notamment sur le statut de résident que la droite, comme la gauche, n’accepte pas ?
- La vérité de 2014 ne sera pas celle de 2012. Les nationalistes doivent être écoutés car ils font aujourd’hui partie intégrante du paysage politique insulaire. Ils ne sont pas les parents pauvres que l’on a, pendant des années, refusés de mêler au jeu démocratique. Ils ont des idées qui sont suivies par une partie non négligeable de l’électorat. Ils auront une décision à prendre. Ils auront la possibilité de proposer un certain nombre d’orientations pour intégrer une majorité régionale. Ce sera pour eux une opportunité historique d’être aux responsabilités.
- Une coalition impose des compromis. Qui les fera ?
- Il faut accepter que certaines choses ne soient pas mises en route si on n’a pas obtenu un potentiel de voix suffisant pour le faire. Dans une logique de responsabilités, on fait un contrat de mandature, on accepte un certain nombre de compromis en se basant sur les résultats des forces en présence. Si les nationalistes font 51 % des voix, ils pourront appliquer leur programme ; s’ils font 26 %, ils ne pourront pas imposer à leurs partenaires d’une éventuelle coalition ce qui n’a pas l’assentiment général. Et ce qui est valable pour eux est valable pour les autres.
                                                                               Propos recueillis par Nicole MARI

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