Bastia : Les habitants du Puntettu contre la démolition

 

 

Une association s'est formée contre le projet de démolition de certains immeubles du quartier du Puntetto, dont les habitants refusent d’être délogés. Ne comprenant pas l’utilité de leur expulsion, ils affirment être résolus à se battre jusqu’au bout pour rester chez eux. Explications de Michèle Chira, membre de cette association et habitante de ce quartier où elle vit, depuis une vingtaine d'années, dans un des immeubles concernés par la démolition. 

- Pourquoi êtes-vous contre la démolition ?
- J'habite, depuis vingt ans, un des immeubles concernés par la démolition. Avec les autres habitants, nous ne comprenons pas pourquoi il y a ce projet de démolition sur un quartier très ancien, qui est Terra Vecchja, et dans lequel, que ce soit du point de vue social ou du point de vue économique, nous vivons en harmonie.
- Avez-vous fait part au maire de votre désaccord ?
- Nous avons demandé plusieurs fois à être reçus par le maire, qui nous a reçus. Ceci dit, nous ne sommes pas arrivés à nous faire entendre. 
- Que vous répond-il ?
- Que le projet est un projet global, que nos immeubles sont prévus à la démolition et qu'on ne peut pas discuter ou rediscuter du contenu du projet avec l'architecte. Il refuse de concevoir une alternative à son projet de démolition. Il nous met devant un fait présenté comme inéluctable.
- La Mairie invoque-t-elle le prétexte d’insalubrité de vos appartements pour justifier leur démolition ?
- Non. Le Maire sait que nos appartements ne sont pas insalubres. Son idée est que nous serions éventuellement touchés par une déclaration d'utilité publique. Or, nous ne voyons pas où se justifie la déclaration d'utilité publique. Au regard du nombre de logements prévus à la reconstruction qui serait de 20 contre 29 logements prévus en démolition et un gain de 14 places de parking, hors places résidentielles, ce projet ne nous paraît pas motiver un tel chamboulement. C'est démesuré ! Pour nous, ce n’est pas seulement la destruction de nos habitations, c’est aussi une destruction de nos vies. 
- Vous parlez de pressions. En avez-vous subies ?
- Nous refusons que la mairie entre dans nos appartements pour les estimer tant qu'il n'y a pas une procédure qui l’autorise à le faire. En adoptant cette attitude-là, nous refusons de nous faire mettre sous pression. Des appartements ont été vendus au coup par coup, des ententes ont été trouvées.
- Certains habitants sont déjà partis ?
- Nous habitons sur place. Des propriétaires, qui n'habitaient pas sur place, ont été contactés et ont effectivement acceptés de vendre, parce qu'on leur a mis la pression en leur affirmant que leur immeuble serait démoli. Il est facile de rentrer chez les personnes âgées en leur expliquant le projet de démolition. Or, tant qu'il n'y a pas de déclaration d'utilité publique sur un immeuble ou un arrêté d'insalubrité qui prévoit la démolition, on n'est pas en droit de dire qu’il va être démoli. Le projet de démolir n'est pas un acte juridique opposable et ce n'est pas quelque chose sur lequel on peut se fonder pour sortir les gens de chez eux. 
- Est-ce vous qui avez demandé  au groupe d'opposition, Inseme per Bastia, de prendre en main ce dossier ?
- Non. Inseme per Bastia a pris connaissance du projet. Il pense aussi que ces démolitions ne correspondent pas à l'avenir de Bastia. Nous arrivons en soutien de leur démarche parce que nous sommes contre la démolition de nos immeubles. 
- Avez-vous, depuis, trois ans, entrepris certaines actions, notamment en justice?
- Nous sommes allés, bien sûr, consulter un avocat. La difficulté est qu'à l'heure actuelle, le dossier est encore à l'état de projet. Or, un projet n'est pas attaquable. Il faut une décision opposable pour pouvoir entamer une procédure contre cette décision. 
- Dès  que la décision sera prise, irez-vous en justice ?
- Oui. Mais soyons clairs : être contre le projet de démolition ne veut pas dire être contre le projet de rénovation du quartier. Il y a des choses à faire dans le quartier, mais notre idée est de bâtir sur les vieilles pierres, pas de les démolir et de tout casser, pas de casser l'architecture et les gens, pas de reconstruire sur quelque chose de totalement extérieur au quartier. Donc, oui, lorsque nous aurons une décision opposable, nous allons saisir tous les moyens juridiques possibles pour s'y opposer de manière légale.
- Avez-vous espoir que le Maire vous entende enfin ?
- Oui. Bien sûr. Nous voulons simplement être entendus, que le maire entende notre projet de rénovation du quartier. Nous ne sommes pas opposés au maire. Nous n'avons rien contre lui. Par contre, nous sommes opposés à la démolition du quartier.
                                                                                              Propos recueillis par N.M.

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Commentaires: 7
  • #1

    MICHELI (mercredi, 21 décembre 2011 08:18)

    Comment faire avancer la Corse et cette ville de Bastia quand à chaque projet des gens sont contres, que des collectifs ou des association se crées et tout cela par pur égoïsme ou parce qu'on est contre le parti de celui qui veut changer les choses ! pauvre Corse tu es vraiment maudite ! Alors bravo à ceux qui veulent donner une autre image de Bastia que celle de moyen age et allez jusqu'au bout !

  • #2

    U Palatinu (mercredi, 21 décembre 2011 09:12)

    D'un autre côté, il est normal que les personnes habitants les immeubles concernés n'aient guère envie de quitter ce qui constitue leurs foyers, et à ce titre, constitue comme un écrin de leurs souvenirs. En outres, l'aspect ancien de ces immeubles leur confère également une valeur historique au titre de monuments anciens.
    C'est là une histoire très difficile à trancher.

    L'idéal serait peut être de diligenter une expertise indépendante pour évaluer l'état des immeubles sus-nommés. Mais qu'y a-t-il encore aujourd'hui de réellement indépendant ?

  • #3

    Cesari (jeudi, 22 décembre 2011 04:59)

    Certains doivent comprendre que la vraie démocratie passe par par une concertation préalable qui n'a pas eu lieu, que la société civile est le seul recours contre des pratiques municipales sclérosées, oppressives, marquées en permanence du sceau du secret et de la désinformation. La Corse est aussi maudite par la manière dont la classe politique traditionnelle a abandonné le développement de notre ile. Des dizaines d'années ont été perdues. On veut profiter de la manne financière prévues pour réaliser des opérations de destruction dans le centre le plus ancien de Bastia, ce que plus aucune municipalité d'Europe ne fait depuis des années. Les immeubles anciens dont nous parlons ne sont pas insalubres. Si certains préfèrent la brique à la pierre et à la brique du 16e siècle, qu'ils aillent habiter au Fangu (le plus fameux échec urbanistique d'un centre ville récent). L'histoire fait partie de la vie comme le présent et le futur, on ne peut pas le nier l'un en se prévalant d'un désir de modernité qui, outre sa prétention de "bon goût", permet des opération financières et immobilières juteuses, le tout sur le dos d'habitants ou de petits propriétaires qui aurait bien aimé que l'on s'occupe de leur quartier depuis les 43 ans de la 2e dynastie municipale

  • #4

    Carlos Laguinda (jeudi, 22 décembre 2011 08:59)

    Je ne vois pas comment on peut reprocher à tous ceux qui habitent en ces lieux d'y être attachés, et ce d'autant plus qu'il s'agit d'un bâti ancien, chargé d'histoire et de mémoire, que sa démolition ne paraît pas indispensable, et qui plus est, que la décision semble avoir été prise unilatéralement.
    Il y a encore du chemin à parcourir pour arriver à une gouvernance qui prenne en compte l'avis général et particulier.

  • #5

    Polo (jeudi, 22 décembre 2011 16:30)

    Bastia, ville d'Art et d'histoire... Terra Vecchia,centre ancien de Bastia et en particulier son "Pontetto" datant pour partie du XVIII ème siècle, transformés pour le mieux vivre de quelques uns en ensemble résidentiel avec vue sur mer. La mixité socio-culturelle brandie en étendart alors qu'elle est absolument existante dans notre quartier où tout le monde se connait et s'apprécie.
    Des dépenses importantes annoncées, correspondant à la réalisation d'un projet difficilement compréhensible. Est ce vraiment l'avenir que nous construisons?

  • #6

    Colonel de Vinciguerra (vendredi, 23 décembre 2011 11:09)

    On dirait que c'est devenu la grande mode de dénigrer tout ce qui est ancien, et de préferer le béton. Grand bien leur fasse. Mais qu'après ils ne viennent pas se plaindre qu'il ne subsiste rien de patrimonial et que leurs seuls biens sont des murs de bétons à n'en plus finir qui auront empoisonné la terre.

  • #7

    grimaldi (vendredi, 23 décembre 2011 22:55)

    Ne vous laissez pas faire surtout !
    En cas de concertation intelligente tout le monde peut être gagnant, dans le cas contraire tout le monde y perdra, y compris la ville de Bastia.
    Ragardez le panier à Marseille, mille fois promis à la destruction, mais qui a gardé son cachet, et qui malgré les intrusions touristiques (dues justement à cette authenticité et qui apportent un peu d'argent dans le quartier mais sans exagération) est resté néanmoins tel quel, vraiment.