Visite de François Sauvadet : Des syndicats désabusés

Si François Sauvadet, le ministre de la Fonction Publique, est sorti apparemment satisfait de la longue réunion avec les organisations syndicales, qui a duré  plus de deux heures et qu’il a qualifiée de « constructive », cette satisfaction est loin d’être partagée par ses interlocuteurs. Réactions, désabusée de Louis Ducreux, secrétaire départemental de la CFDT, et plus mitigée de François Giudicelli, responsable de l’UNSA (Union nationale des syndicats autonomes). 

Plus de deux longues heures de réunion au lieu de l’heure prévue pour, au final, rien de plus, rien de moins, que la répétition de ce que le ministre de la Fonction Publique avait déjà annoncé la veille, soit la revalorisation de 1,6% de la prime de transport. Cette indemnité compensatrice, appelée aussi prime d’insularité, avait été obtenue au forceps, en avril 1989, après trois mois d’un conflit très dur. Censée compenser la perte du pouvoir d’achat des fonctionnaires corses, elle avait été indexée sur le tarif SNCF. Aujourd’hui, plus de 25 000 fonctionnaires et la moitié des salariés du privé reçoivent en moyenne 1050 euros chacun. Les syndicats, qui réclamaient cette revalorisation, mais indexée sur le coût de la vie, et l’extension de la prime aux retraités, n’ont pas caché leur désappointement. Le ministre de la Fonction publique avait déclaré, dès son arrivée, mercredi soir, qu’il refusait de l’étendre aux non-actifs. Si les syndicats ont accepté de participer à un groupe de travail sur l’indexation à terme de cette prime sur l’évolution du coût réel du transport, ils ont eu le sentiment d’avoir été écouté, mais pas entendu et de s’être déplacé pour « pas grand chose ». 
 

Louis Ducreux, CFDT : « Aujourd’hui, nous avons perdu notre temps ! » 

- Comment s’est passée cette réunion avec le ministre ?

- Il est venu. Il a fait son speech, son laïus habituel. Puis il a fait un tour de table des organisations syndicales où nous avons exposé nos revendications et il est parti. C’était une parodie de négociation. Aujourd’hui, nous avons perdu notre temps ! 

- Quelles revendications ?

- Nos revendications sur les conditions de travail des RGPP et dans les différentes fonctions publiques. Sur la prime compensatoire de transport qui, pour nous, à la CFDT, est une prime compensatoire de la vie chère. Le ministre veut l’indexer sur les transports, alors que les transports nous importent peu ! A la CFDT, nous voulons simplement que le différentiel Corse-Continent disparaisse et que cette prime soit bien sûr augmentée pour les bénéficiaires et surtout étendue aux retraités. 

-Le ministre dit qu’il n’y a aucune raison que cette prime de déplacement s’applique aux non-actifs …

- C’est ce qu’il dit. Nous lui avons parlé de l’indemnité trajet résidence/travail qui existe sur le continent. Il ne veut pas nous la donner, il ne veut même pas en parler sous prétexte que nous bénéficions de la prime de transport, mais c’est différent ! La prime de transport entend simplement gommer le différentiel de prix entre la Corse et le continent.  

- Le ministre présente cette revalorisation de 1,6%, dans le contexte de crise actuelle, comme un geste fort du gouvernement à l’égard des fonctionnaires corses.

- C’est vrai qu’une hausse de 1,6% pourrait paraît importante sur de gros montants, mais, sur les salaires que nous avons, elle équivaut à 10 litres de super par an ou à 12 litres de diesel ! Pas grand chose !

Le cadeau, il a du le dépenser en transport aujourd’hui ! Vu le coût de ce déplacement et de sa soirée avec Mr le député de Haute Corse, il aurait du faire carrément un chèque aux fonctionnaires ! 

- Il affirme pourtant que les deux députés UMP ont fortement relayé vos attentes.

- Nous sommes peut-être en campagne pré-électorale. Le Parti Socialiste l’a commencée par les primaires, la droite commence par faire le tour de France. La dernière fois, le ministre était venu soutenir Camille de Rocca Serra qui est en danger sur sa circonscription, aujourd’hui, il vient soutenir son ami Sauveur Gandolfi-Scheit. 

- Allez-vous participer, comme annoncé, au groupe de travail sur l’indexation de la prime de transport ?

- Nous allons participer au groupe de travail pour, tout simplement, faire entendre nos revendications, faire entendre que cette prime n’est pas une prime de transport pour se déplacer sur le continent. Beaucoup de gens, ici, n’ont pas les moyens de se déplacer. Quand ils le font, c’est souvent parce que la maladie les oblige à partir et cela leur revient cher. Il y a beaucoup de précarité en Corse. J’ai rappelé au ministre que, lors d’un comité pour le développement de la formation professionnelle en région, un plan régional de formation où l’Etat et la Collectivité sont partenaires, un constat avait été fait en préambule : « En Corse, la vie est plus chère ». Il suffirait qu’il considère ce préambule et nous gagnons sur tous les tableaux. 
 

François Giudicelli, UNSA : « Cette revalorisation est quand même une petite avancée » 

- Quel est votre sentiment après la réunion avec le ministre ?

- L’avantage, c’est que nous avons rencontré un ministre et que chaque syndicat a pu s’exprimer et dire qu’ici, en Corse, il y a quand même des problèmes particuliers. Cette revalorisation, même si elle est minime, est quand même une petite avancée, certes petite, mais une avancée quand même, comparée à certains problèmes de précarité.  

- Vous êtes plus modérés que vos confrères !

- Oui. Mais j’espère que cette avancée ne va pas s’arrêter là. Nous allons en discuter tous ensemble puisque le ministre a proposé la formation d’un groupe de travail sur lequel nous sommes tous d’accord. Ce groupe va fonctionner pour rendre automatique la revalorisation de la prime de transport. Cette revalorisation, il a fallu, à chaque fois, se battre pour l’obtenir ! C’est un petit avantage, mais à condition qu’il soit actif. Nous serons là pour vérifier s’il va l’être ou pas. A nous de nous battre, car cette revalorisation, nous ne savons pas sur quoi elle va être indexée. 

- Quand ce groupe de travail va-t-il se constituer et se réunir ?

- On ne sait pas encore. C’est le ministre qui a la main mise, il a dit qu’il en informerait le Préfet qui sera, peut-être le maître d’œuvre. On va voir. 

- Les réponses du ministre vous ont-elles satisfaites sur d’autres dossiers ?

- Non. Pas vraiment. Il nous a parlé de la crise, mais bon, tout le monde a Internet, la télévision et la radio et est au courant de ce qui se passe en Grèce, à Cannes ou ailleurs. Il a un peu répondu aux questions très précises que nous lui avons posées, mais il était pressé de partir. Il a dit cependant qu’il n’y aurait pas de suppression de poste en 2012 dans l’Education Nationale. Nous en prenons acte. 

- Il prétend qu’il n’y a eu aucune suppression de poste dans l’Education, qu’il y a même 34 000 postes en plus !

- Nous travaillons dans le rural et nous voyons les choses différemment. Dans certains petits villages, se pose toujours la question de savoir si le poste va être supprimé ou pas.
                                                                                                      Propos recueillis par N.M.   

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