Des itinéraires du patrimoine entre Corse et Italie

Inauguration officielle, jeudi matin à Bastia, à l’Hôtel du département, du projet ACCESSIT : « Itinéraires des patrimoines accessibles », lancé en mai 2011 dans le cadre du programme opérationnel Italie-France Maritime 2007 – 2013. Ce projet stratégique est financé par le fonds européen de développement régional au titre de la coopération territoriale européenne. L’enjeu est de construire un grand itinéraire tyrrhénien commun et transfrontalier entre la Corse et trois régions italiennes : Toscane, Ligurie, Sardaigne en créant une dynamique de coopération afin de favoriser la croissance, l’emploi et le développement durable. Explications d’Emmanuelle de Gentili, Conseillère exécutive en charge des relations avec l’Union européenne et la coopération interrégionale.

Emmanuelle de Gentili : « C’est la première fois que la Corse est chef de file d’un tel projet »

- En quoi consiste ce projet Accessit que vous inaugurez ?
- Accessit s’inscrit dans un programme opérationnel de coopération transfrontalière entre la France et l’Italie. Il porte sur les aspects de culture et de patrimoine, qu’ils soient matériels ou immatériels. Le but est de mettre en commun notre histoire, notre culture, notre patrimoine, d’établir des points de convergence entre l’Italie et la Corse, qui a été pendant des siècles sous domination pisane et génoise, et de créer des parcours communs. Nous allons développer ensemble des outils de nouvelle technologie et des liens avec d’autres projets, notamment liés au tourisme, pour valoriser nos marqueurs identitaires.
- En quoi ce projet est-il stratégique ?
- C’est un projet stratégique qui découle de petits projets tests mais est beaucoup plus ambitieux et structurant puisqu’il atteint 6 millions d’euros. C’est la première fois que la Corse est chef de file d’un tel projet et qu’elle dispose de 33 % du budget. Cette responsabilité est symbolique. Nous sommes le seul interlocuteur face à l’Autorité européenne de gestion pour discuter du développement des travaux réalisés en Corse et en Italie, pour valider le bon déroulé, la consommation des crédits, la réalité de ce qui va être fait et l’impact sur le territoire. Nous participons à d’autres projets stratégiques où nous sommes un simple acteur en charge d’un aspect spécifique.
- Les crédits sont-ils déjà disponibles ?
- Ils sont déjà prévus, bloqués et répartis entre les 21 partenaires en fonction des actions proposées par chacun. La Corse est dotée de 1,9 million d’euros, en incluant les frais de gestion puisque la Collectivité est chef de file.
- Quels sont vos partenaires en Corse ?
- L’Office de l’Environnement, le service du Patrimoine de la CTC et des associations qui ont proposé  des actions partagées avec les autres régions de l’espace de coopération.
- Ce programme va-t-il être dynamique en termes d’emploi et de développement ?
- Déjà, le fait d’être chef de file crée pratiquement de fait deux emplois pour la gestion du dispositif : un chef de projet et un chargé de liaison entre les partenaires. Ensuite, certaines actions phares génèreront sans doute des emplois dérivés, notamment à l’Office de l’environnement. La réussite d’un programme stratégique, qui dure trois ans, se mesure à sa pérennité dans le temps et les emplois. Pour la Corse, c’est une première, un test mais nous sommes très confiants. La personne en charge de piloter le projet va mobiliser toutes les forces participantes pour effectuer des remontées de facture et de résultats qui prouveront que nous sommes en capacité de dépenser l’argent européen mais aussi de développer en commun certains domaines.
- C’est-à-dire ?
-La Commission européenne est en train d’établir des indicateurs de taux de consommation de crédits et de pertinence sur le territoire. Demain, elle peut exiger de récupérer l’argent dépensé si elle estime que les actions réalisées n’ont pas d’impact réel.
- Ce critère est-il déjà  obligatoire ?
-;Pas encore. Aujourd’hui, ce qui est obligatoire, c’est d’engager la dépense dans un certain délai. Le critère, qui va prochainement être mis en œuvre, est celui de l’efficacité sur le territoire. Imaginez ce qui peut avoir un impact sur le territoire relève quand même des compétences et des exigences que doit s’imposer un élu local. Un projet sans lien avec les besoins de la population et de la Corse ne peut être retenu. C’est pour cela que nous sommes intransigeants sur l’intérêt pour la Corse des projets proposés par les Italiens et vice-versa. Ne sont retenus que les projets qui nous rapprochent, qui sont en convergence, ce qui n’est pas évident car nous appartenons à des Etats différents, avec des administrations, des logiques et des manières de travailler différentes.
- Et avec des potentiels différents ! Ne craignez-vous pas d’être très en-deçà du potentiel toscan ?
- Non. La preuve, c’est que nous avons réussi à imposer que la Corse bénéficie du tiers du budget. Il ne faut pas se placer en termes de population ou de capacité, mais en termes de volonté de faire, de se donner les moyens et de convaincre de l’intérêt de notre contribution. La Corse s’est sous-estimée pendant longtemps en ne parlant que de ses handicaps. Notre originalité est, aujourd’hui, dans un monde qui se transforme, une force. Avec l’Italie, nous sommes des frères européens, à égalité. Je remets même en cause cette notion de transfrontalier, la frontière n’existe pas dans l’Europe, elle est au delà du continent européen. Je voudrais que cette idée soit mise en valeur dans le cadre de la prochaine politique 2014-2020.
                                                                                               Propos recueillis par N.M.

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