Ton père, ma douleur, de Pascal Renucci

 

 

Un récit autobiographique, un roman engagé

Pascale Renucci publie aux éditions Albiana un roman autobiographique, un témoignage : Ton Père, ma douleur. Le titre, dès le départ, tisse le canevas d’un récit dont le lecteur ne sortira pas indemne.

 L’auteur raconte sa propre histoire : celle d’une femme, à Paris, prise dans l’engrenage d’un amour fou, irraisonné jusqu’à la violence, presque la destruction.

 

Elle tombe enceinte d’un homme qui ne veut pas de l’enfant, le nie, l’oublie dans les tréfonds d’une vie qu’il rejette. Incapable de se résoudre à l’avortement, la narratrice garde l’enfant. Acte qui va plonger la famille dans un enfer quotidien. Violences physiques et psychologiques se multiplient alors jusqu’à la déshumanisation de cette femme.

Pascale Renucci décrit ces journées qui, à chaque moment, peuvent se transformer en calvaire. Mais ne nous y trompons pas. L’auteur, grâce à un style paradoxalement poétique et brutal, à l’image de cet amour, évite l’écueil du simple récit de faits divers. Elle décrit les scènes avec un réalisme cru, une précision parfois cruelle et déstabilisante mais essentielle pour percevoir la dureté des situations. Vérité nue et écriture qui accroche. En lisant la femme blessée ne passons pas à côté de l’écrivain. Féminité et maternité sont analysées, non par des réflexions psychologiques, mais par une écriture du corps, sensorielle. La femme touchée dans sa féminité, meurtrie dans sa maternité va chercher ailleurs ce qu’elle est en train de perdre en elle.

Cet ailleurs c’est la Corse. Terre protectrice, salvatrice, évidemment maternelle. L’auteur n’est peut-être jamais aussi poétique que quand elle décrit l’île. Evocations dans lesquelles tous ceux qui ont un jour quitté leur île pourront se reconnaître. La Corse devient un refuge imaginaire, une « île intérieure », une « survie ». C’est là, dans le souvenir de l’odeur du maquis, qu’elle s’échappe lorsque tout bascule, et qu’elle trouve la force de partir, de quitter cet homme, ce père insondable. Et peut-être de s’engager.

Car ce roman est avant tout un engagement, un témoignage, une parole à travers laquelle s’élève la voix de toutes celles qui ne peuvent pas parler. 

Une voix que le lecteur reçoit parfois avec dureté, peut-être avec douleur, mais une voix nécessaire et courageuse. 
 

INTERVIEW

Pascale Renucci : Tout pouvait basculer pour un CD ou un stylo perdu..."
Vous avez dit, dans la lettre que vous avez envoyée à votre éditeur, que vous souhaitiez que ce livre serve à d’autres personnes. Pensiez-vous à des personnes en particulier ?

Dans cette lettre, je disais, en effet, que j’avais d’abord écrit ce livre pour des hommes et des femmes qui étaient pris dans ce même mécanisme d’amour et de violence. Mais ce témoignage peut, bien sûr, être lu par d’autres. 

L’écriture autobiographique, parce qu’elle est analyse de soi, peut être libératrice voire thérapeutique. Cela   a-t-il été votre cas ?

Non, je ne dirais pas qu’elle a été thérapeutique. Mais elle a répondu à une nécessité, l’écriture a été vivifiante car j’ai, avec elle, un rapport sensoriel. Je ne voulais pas aller vers l’abstraction mais décrire, analyser la féminité et la maternité à partir d’une sensorialité.  

Comment s’est déroulée l’écriture du roman ? A-t-elle été rapide ? Certains passages ont-ils été plus difficiles à écrire que d’autres ? 

Je n’ai pas écrit le roman d’un seul trait mais plutôt par jets, par poussées successives. Certains passages ont, en effet, été plus difficiles à écrire et sont surtout très difficiles à relire. Il s’agit des scènes de violence, de la violence quotidienne où tout pouvait basculer pour un C.D. ou un stylo perdu. Ce sont des passages sans poésie mais qui reflètent la réalité.  

Dans le roman, les faits vous posent en victime, mais vous, en tant qu’auteur et narrateur, vous ne vous posez jamais comme tel. On a même l’impression parfois que les rôles s’inversent. Etait-il important de vous montrer ainsi ?

Tout à  fait. Je ne voulais pas me montrer victime car les autorités sont là pour vous dire que vous êtes la victime et l’autre le bourreau. Bien sûr, on ne peut pas nier les faits et je ne veux en aucun cas les nier. Mais pour progresser, m’analyser, il fallait que je dépasse cette vision manichéenne et que je reconnaisse ce que j’appelle être ma culpabilité passive. Si cet homme n’allait pas bien, c’était à cause de ma présence, il fallait que je m’en aille.  

Vous donnez à la Corse une place importante.  Quel rôle a-t-elle joué pour vous ?

J’ai, en effet, voulu que la Corse tienne une place importante dans le roman car elle a eu une place déterminante dans mon histoire. Elle a été, pour moi, la terre avant la mort, un refuge, à la fois imaginaire et réel. Elle représentait, en effet, un terrain de fuite possible. J’y ai sans doute puisé aussi la force de partir, de m’enfuir. 

Ce roman, votre premier, vous a-t-il donné  envie de continuer à écrire ?

Peut-être….

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Commentaires: 1
  • #1

    VALLI (jeudi, 22 août 2013 16:41)

    Ce livre est dur et mêne à l'angoisse
    ce qui peu arriver aux enfants et à vous même... c'est l'angoisse
    le drame est toujours là...latent, parait éminent...
    Vous etes vous noyée dans la déshumanisation de la femme que vous etes ?...
    Pourquoi ? pourquoi ?